Comme le jeune homme dans « l’Alchimiste » de Paolo Coehlo (1988), il nous arrive à tous je pense d’être fortement interpellé(e)s par les missions de vie tout à fait matérielles : gagner bien et connaître la stabilité, être avec l’homme ou la femme de nos rêves, connaître peut-être le succès.
En effet le jeune homme se surprend, au début de la nouvelle, à rêver d’être un marchand de pop-corn avec de l’assise plutôt qu’un « simple » berger, pour mieux séduire la femme de ses rêves. Et il se confrontera plusieurs fois au cours de la nouvelle à l’envie de rester sur ses acquis.
D’un côté, cela lui aurait offert le gain secondaire de ne pas devoir confronter ses peurs, ses émotions les plus profondes. A terme néanmoins, il serait très probablement tombé dans l’errance et le regret de n’avoir pas su écouter son cœur, aller jusqu’au bout de sa légende personnelle – qui consiste à trouver le trésor qu’il a vu dans ses rêves, au pied des pyramides d’Egypte.
On peut je pense voir un parallèle fort avec notre monde dans cette nouvelle, qui semble sur le fond indiquer au lecteur de l’importance d’écouter son cœur. Nous sommes en effet nombreuses et nombreux à rechercher une certaine forme de succès, qui parfois relève de nos peurs, de nos enfermements les plus profonds : que serait-on sans carrière, sans vie amoureuse bien établie ? Peut-être notre vanité-même serait-elle démasquée au moindre coup de vent ?
En réalité, peut-être que sans réussite nous craindrions de ne plus nous sentir exister, d’être insignifiants aux yeux des autres et à ses propres yeux. Et pourtant on peut se demander : quel est ce succès que nous désirons tant, et a-t-il réellement le pouvoir de nous rendre heureux ?
J’ai beaucoup aimé les notions de « soi social » et « soi essentiel » (Martha Beck, 2005), permettant de faire une distinction claire: d’un côté, nous avons les normes et conditionnements appris en société (ou « barrières de sécurité ») qui nous guident au quotidien, et, parfois, voire souvent, dans nos choix de vie, de carrière, et que nous pouvons appeler « soi social ». De l’autre, la notion de « soi essentiel » se réfère aux aspects inhérents à notre personnalité qui font que nous sommes profondément attirés par telle ou telle dimensions, activités, etc. dans notre vie.
Comme dans l’Alchimiste, c’est lorsque nous parvenons à nous connecter à notre partie la plus essentielle, à notre cœur, que nous pouvons accéder à cette sagesse, cette guidance profonde qui sait exactement comment nous mener vers la réalisation de notre légende personnelle, au cours de laquelle nous sommes amenés à nous surpasser et à nous réaliser. C’est elle qui nous permettra d’acquérir une maîtrise et de gagner en confiance personnelle, et de trouver le trésor qui dort en nous et sa contrepartie, bien réelle, qui existe dans le monde physique. En effet, le jeune homme, ayant « obéi » à son cœur et bravé les obstacles internes et externes, peut accéder à un trésor réel.
Dès lors on peut se demander comment se mettre en chemin. Chose intéressante, il semblerait que le « soi essentiel » ou notre cœur, pour faire un parallèle, trouvent toujours les moyens de se manifester pour nous faire prendre conscience des choses et nous remettre sur le bon chemin.
Ainsi, pour reprendre un exemple de notre réalité bien à nous, il est courant de voir celles et ceux qui se laissent majoritairement « gouverner » par leur « soi social » s’« auto-saboter » dans les contextes où elles/ils trahissent leur soi fondamental. A combien de personnes est-il par exemple arrivé de se retrouver dans des entretiens d’embauche où, malgré toute la bonne volonté employée à « réussir », il leur venait spontanément de se trahir, d’ « échouer » l’entretien.
Je pense que tout choix et action menée sous l’emprise de la peur, du manque ou de la contrainte ne peut que nous laisser avec un sentiment de « vide » et nous confronter à des issues complexes à gérer. Au contraire, lorsque l’on suit notre voix intérieure, on peut ressentir tout choix en rapport à cette direction innée comme étant fluide, léger et harmonieux… comme le bonheur.
Il m’est arrivé d’être attirée par certains domaines, pour finalement me laisser « happer » par des années d’études universitaires dont je ne vois pas encore l’entière utilité. Par peur de déplaire avant tout à moi-même et quand j’y pense aussi à mes parents, comme je sentais qu’il fallait que j’assume des responsabilités pour avoir une place dans la société… dans cette vie… sur terre.
Maintenant j’ai pu grâce à un important travail personnel lâcher une grande partie des attentes vis-à-vis d’une carrière-« type », pour vivre le métier dans lequel je me sens à ma place, qui a réellement un sens profond pour moi. En réalité, chacune des actions que je pose, chacune des séances que je guide a une saveur de réussite car je suis heureuse de contribuer ainsi et à chaque fois au bien-être des personnes. Bien entendu, à chaque nouveau cap que je franchis, de nouvelles zones d’inconfort vont se révéler en moi. Une fois ces peurs et gênes dépassées, je fais en sorte de capter le vent dans mes voiles et me voilà, de plus belle, lancée, « soutenue » dans la réalisation de projets me tenant à cœur.
Peut-être avez-vous vous-mêmes des rêves qui demandent à fleurir dans votre vie, à vous rapprocher de votre véritable bonheur, si unique et personnel ! Peut-être ces rêves se cachent-ils encore derrière des zones d’ombre, d’inconnu ? Et alors, quels « interdits » vous empêchent-ils de les réaliser ? Quelles croyances limitantes, quels vœux vous seriez-vous faits dans le passé… Peut-être est-ce le manque de confiance à force d’avoir été rejeté(e)s de si nombreuses fois … ou tout simplement le besoin de vous voir accordées toutes les permissions d’être heureux, de voler de vos propres ailes ?
Et si votre « succès » à vous commençait par la simple gratitude pour le champ vaste et infini de possibilités qu’est votre vie ? Alors il se peut que vous trouviez la place pour y planter et voir grandir, l’une après l’autre, les graines de votre cœur…
Comme disait le vieux roi dans l’Alchimiste, « quand tu veux quelque chose, tout l’Univers conspire à te permettre de réaliser ton désir ».
